Audio : Souvenirs d’une ferme de grand tétras dans les Pics d’Europe

J’écris toute cette chronique au passé. L’enregistrement est très ancien, du lointain printemps 1993dans un lever de soleil dans le Forêts de hêtres de Sajambresur le versant léonais du Pics d’Europe. Mais là-bas, et dans presque tout le massif cantabrique, les grouses ont disparudans un processus imparable qui affecte l’espèce dans toute son aire d’expansion.

Depuis plusieurs années, la première de ma carrière en montagne avec un micro à la mainC’était presque un rituel. Tandis que le grouse ils ont commencé leur fanfaronnade dans les forêts de hêtres cantabriques, je suis parti à sa recherche. Des journées qui commençaient tard dans la nuit, à deux ou trois heures, pour atteindre le cantaderos une heure avant que le ciel ne commence à s’éclaircir à l’est. Murias de Paredes, Somiedo, Pandetrave, Sajambre… Une longue marche dans le noir, se heurtant à tous les obstacles qu’un vieille forêt peuvent s’interposer, qui sont nombreux, pour entendre au loin le premier indiceune sorte de pop que tout le monde, les coqs et nous, considérait comme le signe d’une fête.

Si l’entretoise du grand tétras est une ritualisation, l’approche furtive l’est aussi : trois pas après le blocage -pas un de plus-au moment où le coq est censé ne voit ni n’entend, s’arrêter en équilibre instable et recommencer. Dans ce genre de « La cachette anglaise » -un deux et trois, sans bouger les pieds !-, après moult marches et sit-in, nous arrivons à la carrière, un terrain d’exposition communal où les coqs ils étaient exhibés devant les poules. Là, sur un terrain plus ou moins plat parsemé de hêtres, on entrevoyait la silhouette des mâles dans les branches inférieures, noir contre la nuit noire.

Grand tétras cantabrique mâle (EFE/Fondation Biodiversité)

La séquence vocale qui nous avait guidés jusqu’ici s’est alors développée clairement, une série de sons bien définis, qui se répétaient régulièrement: clics forts et espacés appelés roulements lorsque ils semblaient articulés, qui accéléraient pour céder la place au bouchon et se résolvaient avec un gloussement, appelé seguidilla ou refilo. Certains termes que nous connaissions par cœur pour les avoir déjà lus dans le monographie monumentale de Javier Castroviejo sur le coq de la monture.

À un moment donné, avec un reniflement et un battement d’ailes, le tétras Ils sont tombés au sol et ont continué leur rituel, en cercles au sol parmi les poulets qui, sans montrer beaucoup d’intérêt, picoraient les feuilles. Et le tout illuminé par le pâle lumière des étoiles magnifié par la neige. Il était alors temps de revenir, quand le ciel commença à gris par ascenseur Nous avons laissé les appels derrière nous, seule garantie de savoir que notre présence était passée complètement inaperçue et nous n’avions interrompu aucune relation.

Depuis lors, les choses ne se sont pas bien passées pour la grouse. En aucun point de sa vaste aire de répartition sur tout le continent, mais beaucoup moins à celles de la sous-espèce des forêts cantabriques. Les mâles chantent seuls, il n’y a pas de rivaux pour relever le défi. Pas une seule poule ne court sur le sol de la forêt, et toute leur parade est perdue dans la nuit. Les causes de la régression sont discutées – consanguinité forcée par la chasse dans le passé, excès de prédateurs et de bétailo-, toutes les mesures correctives sont tentées : protection stricteélevage en captivité, repeuplement avec des arbres fruitiers sauvagesinstallation de ruches mobiles pour favoriser la pollinisation des bleuets et autres plantes nutritives, etc.

Mais rien de tout cela ne semble fonctionner et dans la cordillère cantabrique, il y a longtemps que très peu d’embrayages volent. Certaines personnes pensent que les grands tétras dureront aussi longtemps que les derniers spécimens vivants dureront. Dans les villes pyrénéennes la situation est meilleure, bien que la baisse de ces dernières années dépasse 50 %. La même chose se produit dans le reste du continent, mais comme ils y sont plus abondants, la situation n’est pas si critique. Et il est déjà difficile de ne pas se pencher sur le réchauffement climatique et la perte de synchronisme entre les cycles de la forêt et ceux de ses habitants pour expliquer le phénomène.

J’écris toute cette chronique au passé. L’enregistrement est très ancien, du lointain printemps 1993dans un lever de soleil dans le Forêts de hêtres de Sajambresur le versant léonais du Pics d’Europe. Mais là-bas, et dans presque tout le massif cantabrique, les grouses ont disparudans un processus imparable qui affecte l’espèce dans toute son aire d’expansion.